Le diable du néon, le diable de
la mode, de l’image, du rêve de gloire. Se déposséder de soi pour
devenir icône, mannequin, image glacée et glaçante offrant à un monde matérialiste
son écrin, ses symboles et ses symptômes.
Le film de Nicolas Ridding Refn
annonce la couleur des la scène d’ouverture. Un
homme vêtu de noir et blanc en sang sur un canapé, et des flashes. Il s’agira donc de
mort. De mort de l’Etre et de mort tout court.
Jesse monte à L.A pour devenir célèbre,
elle signera d’ailleurs un contrat, un pacte avec Faust, de son
sang. Le sang de la brebis pré-pubère, celle qui capte l’attention,
attire les jalousies – la scène dans les toilettes au début, avec ces
mannequins qui ont des lames de rasoir dans les yeux à son encontre. Celle qui
prend les rôles aux autres. Celle que ses collègues haïssent, jalousent et rêvent
de tuer puis de littéralement manger.
Plus Jesse devient icône plus
elle se perd, plus elle est révélée plus elle devient une cible et une proie.
Tous en veulent à sa chair et à son sang, elle saigne d’ailleurs souvent dans
le film, un sang menstruel mais pas que, elle se taillade ou se fait taillader,
elle paie de sang ses moments de gloire, lesquels sont tout sauf immortels. Car
elle ne fait que remplacer une gloire et sera remplacée par une autre. Par une
autre sangsue.
L’univers esthétique, baigné d’électro,
flirte du coté de certains Lynch, irréel, aseptisé, comme un décor de studio,
de fort nombreuses scènes sont filmées dans des sortes de blockhaus dont toute
réalité est exclue. L’univers de la mode est celui de la mort d’ou toute vie
est proscrite, il se nourrit du sang de ces figures éthérées, métamorphosées
par des Méphisto impuissants et cruels, uniquement mus par l’ambition et l’envie
de se servir d’autrui, de le rabaisser. La violence sourde de Neon Demon est celle de l’amoralité, de l’insensibilité, de
la perversité, du gout pour faire mal et pour maculer l’innocence de crachats
et de caillots sanguinolents.
Victime expiatoire pré-pubère, la
trop jeune Jesse sera ainsi tuée puis mangée, puis digérée puis recrachée par
ses convoyeurs, lesquelles voudront surtout récupérer pour mieux se l’attribuer
son œil, son globe oculaire, c’est-à-dire son regard. Mais elles ne feront que
gober de la chair déjà morte.
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