Tiraillée entre sa tradition libertaire et ses
prétentions d'eldorado numérique embourgeoisé, Berlin voit exploser ses
contradictions avec l'arrivée contestée d'un avant-poste du géant californien
Google, dans le quartier de Kreuzberg.
«Fuck off Google» : entre manifestations mensuelles
et tags rageurs, aucun des six projets de campus de Google à travers le monde
n'a été accueilli aussi froidement que dans la capitale allemande. Le
géant du net prévoit d'installer en octobre 2018, dans une friche industrielle
de l'ouest de Berlin, 3 000 m2 de bureaux, cafés et espace de co-working,
une vitrine locale de l'esprit de Mountain View, où siège Google en Californie.
Berlin – cette capitale suit exactement le chemin
pris par Paris, Londres, Barcelone, Lisbonne, bref, toutes les autres.
Gentrification, tout-au-fric, sus aux artistes indépendants, embourgeoisement bobo, vente à la découpe aux américains et à la Sillicon Valley sur fond de politiciens
complices, évasion fiscale, évidemment fascination pour le vide sidéral du tout-numérique, et – ca va avec – nivellement culturel par le
bas.
Berlin Ouest – ce quartier va bientot devenir un réservoir à crétins
en costumes Zara et X phones tout droits sortis du dernier salon High Tech avec
ses joujoux Apple et Microsoft en guise de cerveau portable. Cette armada de
petits cadres aussi prétentieux que
creux est tout bonnement en train de prendre la place en sirotant une bière bio de
tous ces merveilleux artistes underground de la ville mythique. C'est comme si
on enterrait Bowie une seconde fois au profit d'une sous-classe
pêtant plus haut que son cul, payée 3000 euros par mois, tout juste bonne à faire des jobs
chiants de technicos pour capitalistes et fonds de pension ricains.
Google … Sérieux, Google … LA firme de l'intelligence artificielle et du flicage des humains,
celle qui prépare à la dictature absolue, celle qui demain remplacera
tous ces anes apatrides par des robots et les mettra à la rue comme
des chiens … Ces nouilles de petits cadres, les activités réelles
de leur Gogol championne ils connaissent pas, pour eux, la puce RFID c'est du tout
cuit d'avance, les gars ont rien dans la tete et encore moins dans le slip. L'histoire, l'ethique, les
autres, le sens des choses, la spiritualité, bref tout ce qui fait d'une vie une
vie, connaissent pas. Tout pour ma gueule … On vire des gens de leurs apparts,
on les fout au chomage, on les jette dans de sinistres banlieues, on assèche des
artistes de valeur pour les remplacer par eux, petits lapins crétins heureux de payer un café Starbuck Monsanto dix
fois son cout, et qui ravis comme des personnages de Black Miror – c'est-à-dire en état de zombies – iront tels les rats du joueur de
flute visiter sourire aux lèvres les bureaux high tech de leur futur égorgeur.
Tolkien, Herbert, Orwell, Lucas, Bradbury, Dick,
Huxley, Damasio, les gars, vous fatiguez plus, vous avez écrit pour rien, les gars ont rien compris au film,
eux c'est Disney, les Bidibules, Némo et Dora, vos bouquins prophétiques ils ont pris ca pour du fun …
Le système créée par milliers des jeunes vieux avant l'age, tout
adonnés à leurs gadgets, à leurs sites
de rencontres, à leurs bars et boites pourries du vendredi et du samedi et à leurs séries pour débiles sur Netflix. Ces chasseurs de Pokemon blancs comme des cachets d'aspirine, la
jeunesse berlinoise, la vraie, la de-souche comme on dit, ne peut que la
regarder prendre SES quartiers avec mépris. Ces squatters putes du système sont les
dupes et les marionnettes emasculées
d'un totalitarisme que les précédents, peintres, chanteurs, groupes de rocks,
taggers, dénoncaient depuis des lustres. Totalement lobotomisés par le Veau d'Or, le Dieu
Argent et son appendice assexué
High Tech, ces adorateurs de leur nombril encore accrochés à celui de maman, ainsi que tous ces quadras et
quinquas abrutis à force
de vouloir rester à la page, auraient en son temps pour quelques
biffetons sans doute signé
aux jeunesses hitlériennes. La
mode, la mode, la mode, ces incultes n'ont rien compris, rien retenu de l'Histoire,
Fassbinder, connaissent pas. Leurs grands parents s'étaient vendus
à l'Oncle Sam en 1945, soixante dix ans après ils jettent
la dernière pelletée sur ce qui
restait de l'honneur d'un grand pays et d'une ville qui
fut si longtemps coupée en deux par
le Mur de la Honte.
Ce mur, le voila, Google vient de le réintroduire, 29 ans après sa chute.
Un mur en high techs et locaux spacieux avec espace massage et garderie. La
honte est revenue à demeure.
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