vendredi 11 mai 2018

Chefs d’oeuvre du 7ème art - La porte du paradis



1890, Wyoming, la conquête de l'ouest, les fondations de l'Amérique démocratique, les vraies, révélées par Michael Cimino au sein d'un brulot de près de quatre heures. L'envers de la légende commençant par un bal circulaire splendide, les promus de Yale, une jeunesse pleine d'espoir s'élançant dans la vie et dans le nouveau continent sur des pages blanches.

La réalité les rattrapera un à un.

Le fond de La porte du Paradis est base sur des faits authentifiés. Une liste de 125 immigrés, des pouilleux venus pour l'essentiel d'Europe de l Est, à abattre comme des chiens par l'armée régulière, parce qu’ils mettent en péril les intérêts de propriétaires privés. Dès ses origines, l'Amérique fut aux mains des riches, la justice et la police leur sont acquis, les pauvres s'entassent dans des bidonvilles, sont utilisés tels des esclaves, comme les noirs dans les plantations, par les compagnies de chemins de fer et de pétrole, pour créer des villes comme on fait pousser des champignons. Pressés comme des citrons, sous payés, entassés dans des trains comme du cheptel, ils sont, après le massacre des indiens et les esclaves venus d'Afrique, les troisièmes victimes de cet Eldorado construit sur des flots d'hémoglobine et de mensonges. Seuls en Amérique comptent l'argent et le pouvoir qui va avec. Et ce pouvoir donne le droit à tuer.

Le 3eme film du multi oscarisé réalisateur de Voyage au bout de l'enfer détient un bien triste record. A lui seul il mit a terre United Artists, le studio créé par Charles Chaplin. Victime du perfectionnisme maladif de son génial auteur Michael Cimino, il vit son budget passer de deux à quarante millions de dollars. A sa sortie il fut assassiné par la critique outre atlantique et ne tint que quelques petites semaines à l'affiche. Avant de réapparaitre 15 ans plus tard, enfin reconnu a sa hauteur.

Je le découvris émerveillé en 1981 à sa sortie, dans une version raccourcie de plus d'une heure. Meme massacré au montage sa beauté d'opéra funèbre explosait. Il était après Voyage au bout de l'enfer une logique suite dans le meme sillon, fouiller l'histoire récente et ancienne des Etats Unis et en tirer la substantifique moelle tout en réussissant des portraits de personnages admirables, presque mythiques, confrontés à la grande histoire qui balaie tout sur son passage.

Ici Kris Kristofferson, Isabelle Huppert et Christopher Walken incarnent magistralement ce trio amoureux prêt à sombrer dans la mort, ils vivent sous nos yeux, avant d'être emportés par un tourbillon d'horreurs, de purs moments de grâce.


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