lundi 10 juillet 2017

Le jour de la Vierge (extrait de SUNDANCE/GENESE vol.2)


Il y eut une immense bousculade, à l’abordage sur le fronton du port. Telle une meute, la centaine de femmes et les hommes les accompagnant se précipitèrent ventre à terre et enfants hurlants juchés sur le dos, sous un soleil fracassant, en direction du petit ponton. Impatients et craintifs, les touristes voulaient les enjamber, mais la masse des pèlerins faisait tant corps, silencieuse face aux cris indignés des vacanciers, que quelques uns seulement purent passer.

Ils restèrent sur le pont, observant de loin ce déchainement en ce jour de la Vierge. Depuis l’endroit où ils se situaient, ils pouvaient apercevoir la longue rue montant en direction de la Basilique, haut, très haut sur la coline que tous allaient ainsi escalader.
« Il y a quelque chose de grotesque et de sublime, lâcha Suzanna, encore retournée de sa rencontre avec la femme tzigane, qui se tenait là, à leurs pieds, attendant elle aussi son moment.
-          Le sublime dépasse le grotesque, fit Pierre. Il y a là tant de foi que c’en est renversant.
-          Certaines de ces femmes ont quatre-vingt ans passés. Où vont-elles puiser la force pour escalader sous ce soleil de plomb ?
-          En elles, évidemment », murmura Laure.
Expedit s’était approché de la femme. Il entendit un cri, que personne sinon lui ne perçut dans le vacarme ambiant.
Son petit frère venait de frapper l’enfant sur le dos de sa mère.
Il tâtonna. Le soleil aveuglait son regard éteint plus encore, et éveillait ses sens avec davantage de subtilité. Il sentit l’enfant, plus jeune que lui, se retenir de tomber, et vint se poster sous lui, pour faire corps avec le sien, et l’aider à prendre appui.
Il sentit Valérian, qui, l’observant, fulminait. Et comprit quand ce dernier, s’acharnant, fit chuter l’enfant en le tirant par le pied.
La femme, soudain, ouvrit les yeux. Et, se retournant, comprit.
Elle releva son enfant, le caressant au visage. Puis avança la main en direction de Valérian, qui la mordit.
Elle retint un cri. Et vit Expédit s’avancer vers elle, se saisir de sa main, et y déposer un baiser.
Elle s’abaissa alors, abaissa sa tête, et, lui rendant hommage, se signa.



Ce furent Laure et Charles qui, sitôt qu’elle eut pénétré le seuil de la Basilique, lui tendirent la main pour l’aider à se relever. Suzanna et Pierre étaient restés au dehors, avec Valérian, qui pleurait à chaudes larmes.
« Cet enfant est impossible, fit son père.
-          Tu as raison, mais c’est notre fils, répondit Suzanna.
-          Regarde, Expédit qui se tient dans les bras de cette femme. Regarde ce sourire ! Comme il est beau mon fils.
-          Ne fais pas de différences, Pierre. Tu vas creuser un gouffre si tu continues ainsi.
-          C’est pas possible d’aimer pareil, tu le sais bien.
-          Alors fais comme moi chéri. Fais de ton mieux. Vraiment. Fais-le pour moi. Pour lui »
Pierre s’avança et franchit le seuil.
« J’ai besoin de prier », lui dit-il en se retournant à peine.
Et, entrant, il tomba lentement sur un prie-Dieu, tête contre terre.
Autour, les voix bruissaient. Il y eut un silence, soudain, qui prit possession de lui. Un silence aussi étourdissant qu’effrayant. Il s’y abandonna progressivement, et perdit toute notion du temps.



Quand il sortit de la Basilique, la nuit était tombée. Il aperçut, assis sur les marches, son épouse, ainsi que son frère, sa belle-sœur, et ses deux fils.
« Ma famille, fit-il encore étourdi.
-          Mon amour, lui répondit Suzanna.
-          Papa, articula Expedit en s’approchant de lui.
-          Papa », répéta Valérian, qui à son tour se précipita en sa direction.
Et tomba.
Pierre, à pas lents, s’approcha de l’enfant à terre, qui ne comprenait pas.
Il se mit à sa hauteur, à hauteur de ce petit bonhomme haut comme trois pommes, et qui retenait les sanglots.
Il le regarda du fond du cœur, et lui ouvrit grand ses bras.
« Mon petit bout de chou, dit-il. Viens dans les bras de papa ».
Suzanna, à son tour, s’approcha. Sa chevelure noire lui battait le visage, cachant ses larmes, qui une à une coulaient sans un bruit.
L’enfant vint se lover contre son père. Et, relevant la tête, sourit.

Sentant la brise le frôler, Expédit, comme au ralenti, se retourna en direction de la mer, les yeux rieurs.


SUNDANCE : 
Roman en 4 Livres - Genese, Exode, Lamentations, Apocalypse - et 8 volumes est l'histoire de notre monde libertaire, celui des egos surpuissants en lutte contre les anges, depuis les annees 70 jusqu'a la fin des annees 2000.
Situe dans l'univers du pouvoir politique a Paris et sur l'ile de la Reunion, il met en scene deux familles sur 3 generations, dont les membres se partagent en anges blancs et anges noirs, entre ombres et lumieres. Il entremele personnages de fiction et personnages reels issus des mondes artistiques et politiques.


RESUME DE GENESE : Années 70 - PARIS. 
Deux soeurs jumelles, filles d'un Ministre de la République. 
L'une brune, cérébrale et vénéneuse. L'autre, blonde, faussement effacée.
Deux frères au passé trouble ayant fui une ile lointaine, leur père et ses écoeurants secrets.
Au travers de l'union de deux lignées, une plongée dans la folie des puissants, dans la perversion des rapports amoureux, dans un monde où le désir de puissance détruit les âmes et déchaine le retour à la barbarie. 
Un monde sans Dieu où veillent les anges et qu'éclairent encore quelques étoiles.
Une lutte incessante entre les ténèbres et la lumière, entre le libre-arbitre et l'inéluctable, entre l'ego et la dimension spirituelle, entre les rêves et les contingences.

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