Mais où est donc passée la Dame aux caméras,
on ne la voit ni n’entend guère parler d’elle depuis un ou deux mois ? J’ai
lu ci et là quelques indiscrétions plus ou moins réfutées comme souvent par l’intéressée,
comme quoi elle postulerait à l’ONU à un poste à propos du climat, SA grande
cause … C’est que la France, la sienne, étant au bord de l’implosion et le
mandat de son ex arrive à sa fin, il convient pour cette fille de militaire qui
jamais ne s’avoue vaincue de sortir par le haut.
« Dans Sego il y a EGO »,
distilla un jour l’actuel locataire de l’Elysée. A l’époque le bougre l’avait déjà
quittée, mais pas encore poignardée à coups de micro stylets. Pas faux en
effet, mille histoires depuis ses débuts nous sont revenues à propos du
comportement de la Dame sitôt éteintes les caméras. Le sourire impeccable fait
place à la cravache, Ségolène est le contraire d’une tendre, avec le petit
personnel certes mais pas seulement. Elle a la dent dure et n’hésite jamais à
porter le coup et à humilier s’il le faut. Cette femme-là, politique au plus
haut point, ne fait pas dans l’affect – ce qui ne fait pas d’elle loin sans
faut quelqu’un d’inhumain, simplement comme à l’armée, à la guerre comme à la
guerre, on ne confond pas tout et on fonce.
Je la revois dans le débat de l’entre
deux tours de 23007 contre le petit Nicolas soudain assagi face à cette lionne prête
à mordre et qui, bravement, lui distribuait des coups. Maladroite elle le fut
dix fois certes, peu précise, se lançant dans ces phrases sans fin et sans
ponctuation qu’on lui connait. Mais bravache, elle le mordait aux mollets à
notre place avec cet acharnement des perdants. J’avais alors trouvé cela assez
noble, et plutôt sympathique.
Elle fut une ministre fidèle et dévouée
envers celui qui l’avait quittée et trahie. Là encore, quand on est aux plus
hautes fonctions on ne confond pas tout. En bon petit soldat ne lâchant pas un
pet de territoire à l’ennemi, elle alla consciencieusement faire son job sur
les grandes stations de radio, défendant la ligne et le Prince y compris à la
sortie du Trierweiler (fallait le faire), et se permettant parfois quelques
insolences envers tel ou tel qui (elle en connait un rayon sur le sujet)
posaient déjà des jalons de traitrise.
Loin de se confondre à son François,
elle incarne une ligne « autre », différente, parallèle et complémentaire.
Pas la même approche, pas les mêmes sujets, pas la même liberté de ton, pas le même
style. Je la soupçonne d’être en privé extrêmement critique sur ce quinquennat
raté, et de s’être fixé comme ligne de conduite de n’en rien dire. Quoi de plus
naturel quand on va aux racines politiques du couple, à leurs tous débuts dans
l’Elysée sous François Mitterrand. Elle fut et demeura proche du vieux
monarque, politiquement comme affectivement, lui non. Déjà techno, deloriste dès
les premiers temps, il se penchait sur les dossiers techniques, la monnaie, la fiscalité,
l’Europe, tandis qu’elle lançait ses bouées en direction des gens et du sociétal.
Lui fit une carrière en gravissant les échelons et en tissant des accords, elle
fit des échappées jusqu’à se prendre un soir au Zénith pour une rock star.
J’ai du respect pour cette battante,
pour son courage, pour le parcours. J’aime ces personnalités qui fuient le
consensus, qui fascinent autant qu’ils révulsent. Dans un pays où polémiquer et
se battre en guerres civiles comme dans Astérix est une habitude, ce type d’incarnation
de vestale tête à claques fait du bien. Quoi qu’on en dise elle marquera l’époque,
sans doute bien plus que son ex.
Et puis son slogan de 2007, celui qu’elle
avait elle-même choisi, « La France métissée », petite sœur de l’actuelle
« France insoumise », ça avait de la gueule quand même…
A la longue il me semble qu’elle a
fini par gagner le respect de l’opinion. On l’a vue en haut puis tomber puis se
relever puis tomber à nouveau et rester digne. Ça finit par créer à défaut d’unanimité
un pacte de non-agression. A l’heure où la plupart des caciques socialistes
sont dans les sous-sols, elle tient la dragée haute. Continue à faire sa
malicieuse avec ses clins d’yeux a Macron tandis que Valls était en embuscade,
puis son petit passage chez Hamon, avant de prendre la poudre d’escampette. Ca
ne la concerne plus trop, ces bisbilles, le PS éclate comme elle le souhaitait
surement vu les coups pendables qu’il lui a fait.
C’est pas qu’un truc ou on s’en met
`plein les poches - la politique, ça peut être ca mais ça peut être aussi autre
chose de mieux, pas un truc petit. C’est aussi une arène ou on prend des coups,
et un terrain qu’on peut à un moment quitter pour aller sur un autre moins bas
de plafond et moins violent. A soixante ans passés on aspire tous un peu à ça,
la quiétude …
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