dimanche 10 mars 2019

Chefs d’œuvre du 7ème art - Amarcord



Amarcord, en patois, je me souviens. A compter de Huit et demie, tous les films de Fellini, celui-ci encore plus que tous les autres, se réfèrent à un épisode de sa propre vie, que le cinéaste du cirque et des clowns revisite avec sa caméra stylo et ce style unique mêlant comedia dell arte, bouffonnerie et poésie pure.

Ici son enfance – quel plus beau sujet pour un cinéaste que de revenir sur les pas d’une enfance entièrement reconstituée ? – et les années trente dans une petite ville au bord de l’Adriatique qui pourrait être Rimini. Le foyer familial, les années sur les bancs de l’école, les personnages hauts en couleur de la petite ville, mais aussi la montée du fascisme et de Mussolini. Tout un kaléidoscope de séquences en apparence décousues et mises bout à bout comme des sketches, par le jeu de la petite madeleine que l’on tremperait dans une tasse de thé et qui fait telle la mémoire revenir les images.

La mémoire et ses splendeurs, la mémoire qui magnifie et transforme par le seul talent du regard du cinéaste, lequel, maitre chez lui, reconstitue ses propres souvenirs en studio en s’aidant de bric et de broc. Tout est ici comme dans bien d’autres Fellini décor de cinéma, tout ou presque, même la mer est artificielle lorsque l’immense navire de nuit semble s’approcher des berges, ce navire d’E la nave va qui symbolise presque la possibilité de quitter le quai et partir sur les eaux à la découverte d’un monde ouvert.

Le traitement du fascisme au travers du prisme du ridicule vaut tous les discours politiques, Fellini débusque le grotesque, tire à boulets rouges en usant de cette caricature qui rend les petits personnages si risibles qu’ils en deviendraient presque sympathiques – et qui vont jusqu’à tirer sur un gramophone qui diffuse L’internationale.

La femme, les femmes, encore une fois sujets de fascination, les femmes évidemment à forte poitrine, hyper sexuées, et que le petit Federico regarde les yeux exorbités de désir, et qui entrant dans la sarabande de ses souvenirs gourmands fascinent autant qu’elles font rires. Ces monstresses qu’il filme amoureusement telles les amazones de son petit cirque personnel, sous la musique sublime de Nino Rota.

Eblouissements, émerveillements, éclats de rires en cascade, et enthousiasme devant le magnifique spectacle offert par un immense cinéaste qui, maitre de son art comme jamais, nous ouvre la boite aux souvenirs et nous fait de scène en scène pénétrer son petit grenier personnel. Entre Roma et Casanova, cet Amarcord, intemporel chef d’œuvre, et un des plus beaux films jamais réalisés sur l’enfance.


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