Il – le personnage principal joué par Ewan McGregor n'a pas de nom, ce qui n'est
aucunement un hasard vu son métier – est un ghost writer, un écrivain fantôme,
c'est-à-dire un nègre, soit pour le système à la fois un écrivain
raté et un non être n’ayant qu’une fonction et devant ainsi rester dans l'ombre.
Cet écrivain fantôme va être embauché au cours d'un rituel de recrutement ou il parviendra en un tour de main
à retourner le jury en sa faveur afin de remplacer au pied levé un premier nègre,
un premier anonyme, mort non pas à la tache mais noyé à proximité de la demeure
de celui dont il devait écrire les mémoires.
Le sujet, l'être
central non du film, mais selon les normes sociétales, c'est le supposé auteur soit le sujet du livre biographique, à
savoir un ancien premier ministre britannique, entre Tony Blair et Ronald
Reagan, superbement interprété par Pierce Brosnan. Adam Lang est un personnage
public qui passe sa vie dans les jets, sur les écrans de télévision, en représentation
permanente ou en transit donc, y compris dans sa plus grande intimité. Sa propriété,
moderne et minimaliste, posée en bordure de mer, fait penser par l'importance du verre à ce concept de transparence que l'on agite pour cacher ce qu’on a envie de cacher. L'homme public est donc un acteur, ainsi qu’il le contera à
son nègre, un homme à la base absolument dénué de toute conviction ou idée
politique, sorti de l'anonymat par une épouse
aussi cérébrale que frustrée, et qui va le transformer en bête politique.
On est donc face à un mutant, une image, un faussaire, un
acteur, créé de toute pièce, et qu’un nègre sans nom va avoir pour mission d'incarner. C'est-à-dire
fabriquer de toute pièce en utilisant le vecteur émotionnel – la touche spéciale
du personnage de Mc Gregor – un artefact, un faux. Le non-être crée donc un
non-être prétendant au vrai, construit avec des anecdotes plus ou moins
superficielles un être à partir d'une
coquille vide. En cela il imite le métier de son sujet. Puis il va au gré des
circonstances, par une succession de hasards drolatiques, être parallèlement
conduit à découvrir au travers d'un
scandale révélé et d'une menace de la Cour
Pénale Internationale la vérité qui se terre sous le masque de la
respectabilité.
Dilemme splendide pour cet écrivain fantôme non existant aux
yeux du monde que de devenir à ses propres yeux un auteur, c'est-à-dire à partir d'un
engagement au sein d'une quête de vérité
prendre le chemin rigoureusement inverse de son métier, là ou il lui est imposé
par des successions de documents juridiques une absolue confidentialité.
Rupture du contrat il y aura dans les faits, c'est-à-dire affranchissement.
Le scénario, adapté d'un
roman mais co-écrit par Roman Polanski, se réfère par allusions aux affaires
mêmes du cinéaste, alors retenu de force en Suisse pour son propre dossier d'accusation de viol et placé deux mois sous les barreaux
avant une libération conditionnelle. L'image
du suspect, les accusations du tribunal médiatique, le vrai-faux, tous les
thèmes y sont effleurés un à un sans que cela n'impacte sur l'hyper
efficacité de ce grand film, un des meilleurs de son auteur, hitchcockien en
diable.
Film qui a sans doute accablé Polanski...trop juste trop direct : toute vérité n'est pas bonne à dire...
RépondreSupprimerBonjour, rien à voir :
RépondreSupprimerarticle en anglais qui intéressera peut-être : The pentagon's push to program soldier's brain (Michael Joseph Gross) -
+ livre qui m'a touchée "le chemin de la bête" Andrea Japp (volume 2) + voie digne d'intérêt "gene keys" - christophe, quelle est votre date de naissance ?
BAV