J'écris comme je vis, c'est à dire intensément. Je n'écris jamais que quand c'est absolument nécessaire. J'écris pour jeter des ponts vers les autres. Je ne recherche aucune notoriété.
vendredi 5 octobre 2018
Chefs d’oeuvre du 7ème art - Blue velvet
Comme un avant-gout à sa série Twin Peaks. Blue Velvet, datant de 1986, reprend le même schéma. Une bourgade paisible, synonyme du rêve américain, au tout début un zoom avant sur un jardin paisible, une musique, Blue velvet, cool au possible. La caméra, lentement, avance, avance en direction du gazon. Le vieil homme – le père du héros -qui arrose le gazon, qui tient le jet d’eau au niveau de la taille – sic - tombe, terrassé, la caméra avance, découvre une oreille coupée, elle s’avance encore, pénètre la terre, des insectes, de plus en plus gros, qui s’éviscèrent, on pénètre le dessous de la surface des choses, lequel comme dans un roman de Stephen King, est tout sauf paisible.
Ainsi le jeune héros et son amie, lesquels, quittant, lui d’abord, le monde rassurant du jour, s’en vont de nuit dans la ville noire, pénétrer l’envers du décor. Un appartement sombre, une héroïne sombre à la robe bleue sombre – Isabella Rossellini, alors star de la mode avant que d’être actrice, ici chanteuse, prostrée, cheveux noirs bouclés, voix grave, propos incohérents, prise de peurs paniques, tantôt masochiste tantôt sadique.
Le monde de la nuit, le monde du désir, celui du sexe, le sexe trouble, la psyché. A la femme s’ajoute un malfrat interprêté par Denis Hopper, un malfrat à la balafre, qui se fait appeler Daddy et appelle cette Dorothy – Le magicien d’Oz … - … Mummy …
Fantasmes aussi sordides que fascinants auxquels Jeffrey le jeune héros aussi innocent que voyeur va progressivement être mêlé. Dorothy Vallens, la chanteuse, le contraint sexuellement avec un couteau, celle-ci est abusée par Franck le malfrat, révèle son plaisir à l’être, et ainsi reproduit, le tout en usant et abusant d’un vocable freudien, papa, maman. Transgression, déflagration, viol, inceste, toute la panoplie des perversions, dont Lynch fait un portrait fascinant en opposition avec la fadeur niaise du quotidien. Le héros vit ainsi de nuit son dépucelage, entre par la porte qui va faire de lui, au travers d’épreuves fantasmatiques un homme, qui pourra ainsi devenir un mari.
Le monde selon Lynch, l’Amérique selon Lynch, c’est toujours l’envers du décor du rêve américain, l’envers du mélo un peu niais, la confrontation de l’innocent au mal, la force d’attraction du mal. Dans Twin Peaks, le poison viendra de Laura Palmer et de son père incestueux doublé du démon Bob. Ici, un couple maléfique et pervers, proprement irréels, puisés dans l’univers du film noir, incarne l’univers transgressif, ce qui est caché, ce qui a lieu quand les lumières s’éteignent dans certains quartiers mal famés. Le trip hypnotique proposé par Blue Velvet c’est ca. Une descente aux enfers, une remontée à la surface, et un adolescent qui par le désir et la perversion se révèle à lui-même un parfait citoyen américain. Belle ironie …
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