Nées dans un couloir sombre, les flippettes se retournent à tous bouts de champ, ayant de naissance pris leur
ombre pour un autre. Quelle est cette chose qui se dresse toute noire au point
de faire sur ma tête dresser mes ombres de cheveux, pensa le bambin
appeuré. Son avatar adulte, de facto, vit dans cette vague
souvenance de la peur primale.
Ce qu'on voit étant fonction de ce qu'on imagine, le loup des contes pour enfants, celui
des trois petits cochons, descendit chaque nuit dans la cheminée des songes, transformant le jour suivant en
machine à trouiller et l'univers en un
long tunnel au pays de Freddy Kuegger et Hannibal Lecter.
La flippette flippe par essence et tremble telle la
feuille, tout autre est comme un danger, une menace et un péril, tout couteau de cuisine une arme blanche, tout
basané un tueur. Aussi – car cette vie est un cauchemar –
se terrer tel un lapin en sa tannière est l'obsession de cet éternel trouillou qui voit les arbres bouger et les branches venir se
serrer autour de son cou telles des griffes avides de sang. Le trouillomètre est à son maximum en permanence pour ces êtres qui voudraient tant se confondre avec leur
ombre au point d'y disparaitre, et pour qui se réfugier au coeur même de draps soyeux signifie une présence à coté, palpable, qui à tout moment peut bondir sur eux et les étrangler.
Interiorisés au point culminant de leur prison intérieure, ces introvertis maladifs crient sans
prononcer un son, leur regard trahit l'effroi, leurs pas la fuite, leur silhouette tremble
de tous leurs pores, leurs mots se perdent dans le fond de la gorge, et leurs
supliques, ravalées, font de la peine. On ne peut, on aimerait
pourtant, les aider, les rassurer, mais la moindre carresse leur fait peur, ils
craignent le coup de couteau caché derrière le dos.
Ces adeptes pathologiques de la frayeur en tous
instants sont tels les portes d'entrée en notre monde de ce qu'ils craignent le plus. Sans le savoir, sans le
vouloir, les flippettes rendent réels leurs effrois , les font pénétrer le seuil et hanter les maisons. Telles des
deversoirs, leurs maladies subconscientes créent de toute pièce les monstres et les invitent à nos tables. Ambassadeurs sans le savoir des démons les plus effrayants, eux qui sur terre vivent
un enfer le font progressivement advenir.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire