Deux
fillettes ont été violées et assassinées en moins d'une semaine. L'inspecteur
Antoine Gallien poursuit son enquête jusqu'en cette soirée de la
Saint-Sylvestre. Il convoque dans son bureau un notable de la ville, le notaire
Jérôme Martinaud, pour lui faire préciser les circonstances dans lesquelles il
a découvert le corps de l'une des victimes. Agacé par la morgue de son témoin,
Gallien lui démontre qu'il pourrait fort bien se retrouver en position de
suspect. Martinaud perd pied et prête dès lors prise à tous les doutes.
L'inspecteur Belmont, le second de Gallien, va jusqu'à brutaliser le notaire.
Sans grand succès. De plus en plus désemparé, Martinaud se lance dans une longue
et pénible narration de sa vie conjugale...
Huis-clos,
un commissariat de police, une nuit de réveillon de noël, une petite ville de
province à la Chabrol. Quatre
personnages. Trois hommes. Un face-à-face entre un inspecteur de police – un
COMMISSAIRE ! -, Lino Ventura, et un nanti, tout du moins un grand
bourgeois, notaire de métier, en costume et nœud papillon, génialement interprété
par Michel Serrault. Aux cotés du commissaire, un
flic, Guy Marchand, un bas-de-plafond. En coulisse, la femme du notaire, dont
nous reparlerons.
Un
scénario et des dialogues signés Michel Audiard. Au mieux de sa forme. Un Audiard au niveau
des meilleurs scénaristes du cinéma français.
Admirablement
filmé en studios par Claude Miller – sa première
commande après deux films populaires, et son plus gros succès -, Garde à
vue
est avant tout un film de dialoguiste et d'acteurs. De très
grands acteurs. Sans gras, sans une minute perdue. Un film tendu à l'extrême, poisseux,
ramassé. Du très grand art.
Le
face-à-face entre deux conceptions du monde, celle de la loi contre celle de la
transgression du fait d'une position sociale,
va donner lieu à un match entre deux
lions parfois ennemis parfois complices. Le détenu mille fois tentera l'esquive, le coup du mépris, les dissimulations, la recherche
d une complicité, l'ironie. Toutes ses
tentatives se heurteront à un mur, pourtant son
sort et sa personne intéressent voire touchent son adversaire pour qui seule
compte la vérité.
Le
face-à-face deviendra choc au fil de l'enquête, une enquête
autour du viol et de la mort d'une fillette, une
enquête ou il s'agit de traverser un couloir, celui qui
va en direction de la chambre nuptiale interdite au notaire par cette épouse
qui le hait, et qui à un moment entrera en
scène.
Cette
séquence, dix minutes tout au plus, offre a Romy Schneider le premier rôle
vénéneux d'une carrière marquée par des rôles tous
aux antipodes de celui-ci. Elle est assise en vison noir dans le noir et contre
les usages fume. Le commissaire la laisse faire, alors elle parle, elle révèle,
elle dit non seulement sa haine mais énonce d'une voix murmureuse,
extrêmement émouvante, ce qu’elle espère être la preuve de la culpabilité de
celui qu’elle qualifie de monstre.
Nous
comprenons l'horreur de ce couple, l'enfer de cette maison ou l'intimité est morte,
et ou l'une cherche à mettre l'autre derrière les
barreaux. Et avec cela, la désespérance du notaire, sans doute pas le monstre
dont on nous parlait. Un homme seul, esseulé, malheureux, cynique certes, parfois
odieux, mais un assassin …
Lorsque
le rideau se baisse et que le générique s'achève, sur ces petites notes de musique triste, comme une chape
de plomb qui tombe. La garde-à-vue est achevée. Il
y a un mort. On vient d'assister à 1h25 inoubliable, à une des meilleures prestations
de Serrault, à un des derniers
grands rôles de Lino Ventura, à une superbe
prestation de Guy Marchand. A un visage inédit de Romy. Et à un des meilleurs scénarii jamais écrit en
France.
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