Le
monde est un cirque, le monde de ce Casanova d’opérette que Fellini visiblement
exècre est une mascarade, ce pantin jouisseur à l’ego démesuré, authentique
symbole de la bonne société vénitienne un clown fâcheux tout juste bon à être
ridiculisé. Poudré, perruqué, vêtu comme un précieux, le voilà qui enfile les
perles, s’en va chasser la gueuse, tire à tous bouts de champs dans tout type
de râtelier, détrousse les nonnes, les vierges, les éphèbes, jusqu’à un
mannequin de cire, sorte de ballerine tournant sur elle meme dont il tombera
amoureux.
Ce
pur chef d’œuvre à l’esthétique sublime est tel le chant du cygne d’une fausse
gloire désossée par un authentique artiste créateur, lequel en son Cineccita
reconstitue un univers fait d’ombres, de carton-pate, d’illusions plus belles
que le réel. Ce trompe l’oeil dans lequel il plonge son pathétique personnage
est comme un miroir déformant et une scène de théâtre tournante, chaque décor
pose le lilliputien dans un cirque trop grand pour lui dans lequel il s’en va
se mirer pour mieux jouir en solitaire, piteusement, ridiculement.
Ce
chasseur de donzelles est un pitre, un automate du coït, un pédant. Et ses
conquêtes successives auxquelles Fellini prête sourires et rires feignent
parfois le plaisir qu’il entend leur voler pour leur bien. Casanova est tel un
Don Quichotte sans gloire à la recherche de moulins à vent, il baisse à peine
son pantalon retenu par trop de ceintures, sort juste le nécessaire qu’il
enfourche tel une épée et tel un éjaculateur précoce prend à peine deux minutes
de plaisir pour une chasse de deux heures.
Le
ridicule dévoilé du personnage est comme un miroir tendu a un monde bourgeois
adepte de la jouissance pour seule finalité. Ricaneur, clownesque, Federico
Fellini compose une symphonie de couleurs du plus clair vers le plus sombre et
laisse son film avancer du petit matin à l’agonie de l’obscurité, ou tel Guignol
son pantin s’en va mourir d’un désir inassouvi sur un faux lac de givre.
A
la fin, la ballerine automate et sa petite musique signée Nino Rota semblera
plus humaine, plus en chair que les derniers restes du vieux jouisseur à la
peine, seul, tout seul, définitivement seul face a un destin mort sur lui-même.
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