lundi 10 juillet 2017

Les fayots


On en a tous connus sur les bancs d’écoles, de ces asticots aux sourires forcés qui tiraient sur la jupe de la maitresse et se poussaient des coudes pour avoir la meilleure place. On se souvient tous comme ils nous insupportaient, ces insupportables cornichons de la flagornerie. Et de leurs fielleuses paroles tout en sucre venimeux. Tout leur était dû, à eux qui ne s’aimaient point, toutes les trahisons, toutes les fourberies, les croche-pieds, et que je me rapproche du plus fort, et que j’écrase le plus faible, et que je change d’écurie selon mes intérêts du moment ! Lécheurs, lâcheurs, copieurs : ils osaient tout et avaient parfois plus que tout.

Petits saligauds ! Les voilà adultes à présent, aux rangs intermédiaires du management dans un nombre incalculable d’entreprises, d’administrations et d’associations. Les puissants en font du miel, ils les utilisent, les flattent, jouent avec eux comme on joue au GO, en les plaçant dans les tours de contrôle.

Ces naïfs croient qu’ils les aiment ; alors que cette instrumentalisation se fait aux dépends de tous. Ils seront donc les derniers sacrifiés, ces fidèles, si écœurement fidèles zélateurs de leurs égorgeurs. On ne les entendra même pas hurler de douleur au moment où la gueule du lion se refermera sur leurs têtes.

Que reste-t-il de leur œuvre, sinon une abyssale vacuité ? Ces techniciens de seconde zone incapables de créer quoi que ce soit ont obéi à toutes les règles, suivi tous les chemins balisés, collectionné tous les diplômes de troisième catégorie, occupé tous les postes à la con de la terre. Leur CV fait 10 pages et aligne les banalités avec un style pompeux, ils se sont creusés les méninges trois plombes pour pondre un pensum que personne ne lira jamais.

Tout juste bons à 45  ans pour un bilan de compétences, ou la psycho pose la question qui tue : de quoi avez-vous envie Mossieur ?

Ben rien Madame, je veux dire reprendre la place qui m’est due, au premier rang sous le talon de mon maitre, à lui cirer les mocassins.

Mais pauvre andouille qu’elle pense la dame, regarde ta tête, pense à l’âge que t’as ! Des comme toi on en a des plus jeunes, moins chers et plus malins plein les cartons ! Tu crois peut être qu’on t’attendait, toi la chair à canon du siècle passé ? Elle a autre chose à faire que lui dire les choses, la dame, alors elle le balade gentiment de séance en séance en pensant à sa liste de courses. Si tu crois que j’écoute ton cinéma, coco, qu’elle pense, la finaude en se curant les ongles.

Plus de bobonne (trop trompée), plus d’amis (trop trahis), plus de gosses (papa est vraiment trop chiant, la honte devant les potes !) : restent les économies, et la télé. Alors ça ressasse (ah là la), ça geigne (« on est chez nous »), ça emmerde le voisin de palier (celui-là je vais lui envoyer l’huissier hein). Et ça se rancit, ça se ratatine en rhumatismes et migraines et courbatures à toute vitesse : 45 ans, et une tête de fiancé old school de l’Ankou bonne pour la charrette ! Et qui comprend rien à rien : pourtant j’ai fait tout bien, tout comme ON m’a dit.

Ben oui pauvre POMME t’as tout bon tout con. Tu t’es juste oublié au passage. Et tout le monde t’a enterré avant l’heure. Fayoter ça sert à ça : un bon engrais pas cher pour les cimetières.





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