Le
développement inouï des applications de rencontres et de tous ses produits dérivés
dans la communauté gay a transformé un nombre phénoménal de garçons à la base sincères
et désireux de trouver le bel amour en un ramassis de futurs dépressifs frustrés,
n’aimant en rien le reflet que leur renvoie le miroir, celui d’un quadra ou d’un
quinqua qui a laissé passer sa chance et s’est par naïveté autant que par immaturité
adonné avec excès aux vices de la société de consommation.
Gayromeo,
Scruf et Grindr ont rendu quasi impossible le fait que deux hommes se trouvant
dans un même espace avancent l’un vers l’autre après une phase délicieuse d’observation.
Ce charme miraculeux de la belle rencontre est devenu rare : les gars sont
là avec leurs applis et discutent deux plombes avec le mec d’en face sans faire
un pas. Il faut des pastilles magiques pour que les corps osent, les esprits
sont en mode bug depuis des lustres.
C’est
triste, se transformer en produit, mettre ses photos avantageuses, celles d’il
y a 10 ans, torse poil de préférence avec tout le matériel pixélisé en moche caché.
Se mettre dans les bonnes cases, daddy, chubby, bear et tutti quanti, ce
langage de Disney pour des gars de 50 piges avec de la cervelle, et qui l’abandonnent
pour un peu d’amour à trouver dans une ville tentaculaire. Passer des heures,
des mois, des années la dessus dans bouger, comme on prend son métro pour le
bureau en espérant la promotion.
Les
plus jeunes n’y voient goutte, ils sont encore à leur avantage, et n’entrevoient
guère cette vérité première : dans cette gigantesque boucherie, tout le
monde a pour horizon la poubelle a viande avariée.
Ces
kilomètres de messages ou on déballe le menu et où l’on se livre en omettant
beaucoup, comme lors d’un entretien de recrutement. A la moindre mauvaise réponse
tu peux te faire éjecter, bloquer, insulter. Les gens s’achètent, se louent, se
crachent à la gueule par écrans interposés puis font mine de l’avoir oublié deux
jours plus tard. Dans ce cloaque, les plus lâches et les plus méchants sont les
seuls vainqueurs, et les plus fragiles et sincères les cibles préférées. On
glose beaucoup sur l’homophobie, en omettant de dire que la plus féroce est
celle pratiquée en son sein.
C’est
si beau, l’humain, l’amour, la rencontre, la sensualité, la douceur, l’écoute,
le long cheminement pour connaitre un autre. Tout a été massacré et piétiné, de
tristes `plans cul qu’on préfère oublier et qui parfois remontent sans qu’on
leur veuille alors qu’il pleut.
Alors
l’homme seul et esseulé pleure sa triste solitude d’homo occidentalus. Ils
avaient eu tant d’occasions avant pourtant mais sont allés tous ou presque au
plus simple, la chair facile, l’addiction sexuelle, les trucs glauques entre
deux courses, les petits arrangements avec la vérité, les je te lâche pour rien
et je passe au suivant, et je reproduis en moins bien, et me voilà seul a 55
ans avec mon boulot de merde. Trop vieux et pas assez riche pour entretenir un
petit salopard qui me trompera et me piquera sans doute mes sous.
Vous
vous êtes laissés peu à peu détruire par renoncement ou lâcheté, les gars, mais
sachez-le vous êtes encore en vie. Il n’est point trop tard pour les désactiver,
ces applis, pour réapprendre ce que vingt ans auparavant vous faisiez. Sortez,
osez, entrez dans ce bar, ouvrez les yeux, prenez votre temps, contemplez. Lâchez
cette tension intérieure, y’a pas le feu, ce qui doit advenir adviendra pourvu
que vous soyez ouvert et vous-mêmes.
Soyez
plus forts, plus grands, plus sensibles, en un mot plus vous-même que cette logique
mortifère qui envoie tant de vos copains chez le psy et à la pharmacie voire à
la case suicide. L’amour ne se doit, ne se mérite ni ne s’achète ou se loue :
il se vit, se donne à vivre à celui qui l’a en lui et se donne à lui. Ceux qui
vous disent le contraire sont des serpents, n’écoutez que votre cœur les gars,
et réveillez moi ce bel endormi. Et aimez-vous un peu mieux, vous en deviendrez
aimables.
Quant
à vous les beaux gosses auto proclames aux pectoraux piqués aux stéroïdes,
rabattez votre caquet et écoutez vos ainés. Cessez de vous prendre pour des
dieux parce que la nature vous a gâtés. C’est provisoire ce truc, ça dure pas,
le nombre de likes sous vos photos c’est un leurre. Faites preuve de grandeur d’âme,
montrez-vous respectueux et bienveillants envers cet homme qui a l’âge d’être
votre père et que vous bousculez sans ménagement. Car quand à votre tour…
Wow c'est tellement "vrai" ton article ! Je m'y retrouve à l'heure où j'ai décidé de fuir toutes ces merdes d'applications gays, qui n'apportent que déceptions et frustrations. Après, il ne reste plus beaucoup d'autres solutions de rencontres réelles hormis le hasard Tout le monde n'a pas un bar gay etc... A proximité et pour ma part, je ne me suis jamais senti l'envi de m'y rendre Ça ne me correspond pas.VDM!
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