Je me suis réveillé tôt, une fois
encore, peu avant six heures du matin. La nuit laissait place lentement à
l’apparition du jour, et la lumière d’or, par échappées, caressa les branches
des arbres dans le jardin, tandis que café aux lèvres je m’éveillai.
Ca a beau être l'hiver, il fait beau,
soleil haut dans le ciel, rayons chauds et nuages au loin. Chaplin le chaton
dort à la cuisine après avoir couru après mille insectes. Et moi, en ce samedi
paisible, m’assieds au bord de la route et observe les passants en laissant
filer mes pensées.
Le temps passe, une heure, ainsi
immobile, respirant à pleins poumons. Jusqu’à ce que vers dix heures je me lève
et lentement me dirige vers le ruisseau à vingt minutes d’ici.
Je traverse la grand route, emprunte
la rue en direction de l’église, avec ses petites maisons vertes et rouges
vifs, et leurs habitants souvent assis sur le perron, sirotant un téréré. Le
soleil cogne, vingt-deux ou vingt-cinq, j’ouvre en grand ma chemise, m’aère,
puis répond aux sourires des gens assis sur le trottoir.
Les pavés disparaissent au profit de
la terre rouge, celle qui marque aux semelles. Le sentier descend abruptement,
je vois au loin le petit pont, suis obligé de ralentir car mes chaussures
heurtent la terre. Plus personne à l’abord du ruisseau : je descends en m’agrippant
aux branchages, évite les flaques de boue et les détritus, et reconnais le
filet d’eau.
Comme un plongeon dans le passé, le Lot
qui me revient, ces échappées, depuis l’enfance jusqu’à l’été dernier, dans le fleuve
majestueux ou je me baignais nu et faisais du canoë seul pendant des heures,
sans croiser âme qui vive.
Je franchis le ruisseau en
bondissant sur les pierres, puis m’assieds sur l’une et ôte mes chaussures. M’assieds.
Pieds dans l’eau froide : l’esprit s’envole et vagabonde, passe d’un
souvenir à un insecte qui s’approche d’une fleur. Et je reste là : merveilleuse
solitude, surtout que personne, pas une voix humaine, rien que le bruit de l’eau
et certains moteurs au loin.
Rien ne me convient mieux comme
cadre que ça : la solitude, en pleine nature, les pieds dans l’eau. Là,
sans rien faire, jaillissent les idées, ce sera ici qu’en juillet et aout je viendrai
puiser les scènes fermant le 3e volume de Sundance. Inutile de réfléchir
ou de se concentrer, ça vient tout seul d’on ne sait d’où, de haut et du dedans
j’imagine.
Me relevant une heure après je songe
à ces paroles de la chanson de Barbara, Mon Enfance : J’ai mis mon dos nu à l’écorce, l’arbre m’a redonné des forces tout
comme au temps de mon enfance. C’est exactement ça, sans la nostalgie qui
va avec. Celle-ci quand elle survient fait comme un moineau : elle se pose
puis s’envole. Le passé n’est plus, il se pose lui aussi puis s’envole.
(A Florent)
Barbara : Mon enfance
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