Je nourris une forme de passion pour
la civilisation grecque, celle-là qui inventa la démocratie, sur fond d’esclavage,
s’entend : mais la nôtre en est-elle dépourvue, d’esclaves ? Elle
dont les piliers étaient la philosophie et la mythologie. Laquelle, loin d’imposer
un dogme religieux comme la nôtre, laissait à chaque territoire sa propre liberté
d’interprétation, et confiait aux poètes l’écriture de plusieurs « bibles ».
En cette lointaine civilisation, l’homosexualité
entre hommes et femmes était plus que tolérée, et dieux et déesses s’y
adonnaient gaiement. Socrate, le père de la philosophie, enseignait à de fort
beaux éphèbes, lesquels en récompense lui accordaient librement leur corps.
On associe généralement la
destruction de Sodome et Gomorrhe à la débauche homosexuelle qui y régnait – ce
que nient farouchement les premiers textes prophétiques comme Le Livre d’Ezéchiel
qui associe la colère de Dieu à un non-respect du droit et de l’hospitalité. La
réécriture fut postérieure et fit suite à la collision des cultures grecques et
juives. Celle-ci visa la passivité entre hommes, considérant celle-ci comme
infamante en tant que confusion entre masculinité et féminité (cf Le Lévitique).
Cette lecture n’apparut qu’aux IIIème et IIème siècles avant Jésus Christ et s’imposa
fort longtemps au cœur de la civilisation chrétienne telle que défendue par son
clergé.
J’ai beau chercher, je ne vois rien
dans la parole du Christ qui condamne ces pratiques. Cette parole, emprunte d’amour,
se fait ferme et dure au contraire envers ceux qu’il appelle les « pharisiens »,
lesquels sont à juste titre dénoncés par le prophète comme des hypocrites. « Aimez-vous
les uns les autres », ainsi parla Jésus. Sans faire de tri parmi les
brebis.
Son Eglise fut bien entendu aux premières
loges de la même dénonciation calomnieuse de la soit disant satanique pratique
de la sodomie. Pareille obsession dans la dénonciation par des prélats eux-mêmes
parfois coupables de la chose interpelle : quel est donc ce « plaisir
interdit » qui fait trembler les fondations de Rome au point de devenir
dans l’histoire de notre civilisation l’objet d’une véritable obsession ?
Y aurait-il dans cette pratique supposée démoniaque une « porte »
vers autre chose, une chose qui éloignerait sans doute la brebis prétendument égarée
de son troupeau, et donc de son geôlier ?
Il est cocasse de relever cet
obsessionnel acharnement à maintenir le joug de l’interdit des siècles durant,
puis à assister ces dernières décennies au desserrement de l’étau. De voir que
pour les bigots, laisser les gens s’aimer en liberté, tous sans exception,
revient à faire trembler leur temple. De constater une fois encore que cette
simple pratique sexuelle qui donne du plaisir aux deux qui l’accomplissent
engendre comme une éruption cutanée l’accusation éternellement ressassée de décadence,
d’abaissement des mœurs et de signe manifeste de la fin de toute une
civilisation.
Car quoi ? En quoi la simple tolérance
pour une pratique autrefois défendue et crainte signifie-t-elle en faire l’apologie ?
C’est bien dans leur obsession maladive pour ce qu’ils craignent en parfaite méconnaissance
de la chose (quoique certains…) que réside le problème, et non dans le couple d’hommes
qui dans une chambre à coucher, à l’abri des regards et dans leur intimité, s’accouple
ainsi.
L’homophobie est une phobie, comme
toutes les autres mais particulière. Elle prend la source dans la peur et le
rejet absolu et absolument maladif de ce qu’on ne comprend ni n’admet.
Proprement irrationnelle, cette peur phobique met en lumière non seulement l’étroitesse
d’esprit mais la névrose de ceux qui l’entretiennent. En quoi le plaisir de l’autre
les dérange à ce point ? En quoi la pratique d’une minorité enfin libre
les fait se dresser les cheveux sur la tête ? Qu’est-ce que cette
obsession révèle sur eux, à votre avis, sinon leurs propres troubles psy ?
Je ne saurais leur conseiller de
faire l’essai – d’ailleurs et cela se sait, certains y sont déjà passés. Ce qu’ils
« ressentiraient » pourrait en effet ouvrir en eux une porte si étrange
que d’un coup d’un seul, pourvu qu’ils se détendent pendant l’acte, bien des
certitudes voleraient en éclats.
Leur interprétation confiscatoire de la parole
du Christ, par exemple …
Une belle analyse Christophe, mais, si je puis me permettre, avant la destruction de Sodome, Lot, protégea les anges venu le prévenir de la catastrophe du lendemain, en offrant ses filles plutôt que ses hôtes à la plèbe qui voulait "les pénétrer". "Donne-nous ces hommes pour que nous les pénétrions" La plèbe refusa les filles, et maudit Lot. Nous avons là le refus d'un homme de bien face à une pratique considérée par Lot comme anti-sociale face à des étrangers non consentants dans un rapport forcé non consenti. Nous pourrions développer cette analyse qui ne remet pas en question le libre arbitre de chacun en rapport à son corps qui n'appartient qu'à lui. Bien à toi.
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