Spectaculaire retournement diplomatique
survenu la veille d’une réunion des grands à l’ONU ou après 6 ans de mise à l’index
pour ne pas dire plus Bachar El Assad venait, par la voie américaine, d’être réintégré
dans le concert harmonieux des nations.
A l’aune d’un miraculeux gazage de
sa population par son armée (une histoire qui nous en rappelle une précédente
survenue en 2013, et à propos de laquelle, comme pour les armes de destruction
massive de Saddam Hussein pas la queue d’une preuve ne fut depuis apportée par
ses promoteurs), le revoilà réassigné à sa place de Grand Satan. Et Poutine,
qui était devenu à force de victoires militaires et diplomatiques le vainqueur
de fait de six années d’égarements occidentaux, reprend aussitôt son bon vieux rôle
de Grand Satan à la puissance deux.
C’est le retour des faucons. La
victoire de Trump n’aura été qu’un trompe l’œil, une parenthèse de quelques
mois. Le matamore éructant vient enfin de recevoir sa fiche de poste et de
comprendre le périmètre exact de son terrain de jeu. En quelques quarante-huit
heures, après l’échec retentissant de ses premiers coups de menton intérieur
(que viva Obamacare !), éjection de son cerveau Steve Bannon et
retournement à 360 degrés. Celui dont le départ ne constituait plus une priorité
(mantra de la diplomatie US depuis 2011) est redevenu ce qu’il n’aurait jamais dû
cesser d’être : le grand méchant loup d’un conte pour enfants.
On vit donc Nikky Haley,
la chère ambassadrice des Etats Unis, venir la larme à l’œil exposer au Conseil
de sécurité de l’ONU les photographies odieuses d’enfants gazés et fustiger les
refus russe et chinois de se retourner contre le régime de Damas. Quant à la sénatrice
Jeanne Shaheen
(les femmes dans la politique américaine seraient elles toutes des Lady Macbeth
en puissance ?), parachevant l’histoire de Barbe Bleue d’une touche tout
en finesse, elle put sans rire déclarer que RT (qu’une autre sénatrice vient de
proposer contre la constitution de son pays d’interdire), ce fameux organe de
propagande de Poutine ayant pignon sur la toile aux States, était l’équivalent
de la presse d’Hitler.
Au pays de Mickey, ça passe comme
une lettre à la poste. Dans les consulats américains que sont devenus la France
et les autres grands pays européens tout autant. L’info étant livrée avec les
croissants directement depuis Washington et un tout petit bureau dans la
banlieue de Londres, on fait peu de cas de ce qui s’appelle une enquête. On lit
les dépêches contre avalisées par Washington et la City, on juge, on sort sur
le perron et on y va. Le gouverneur de France prononça donc avec la plus grande
fermeté sa condamnation, qui fut reprise au mot près par le pantin polonais à
la tête de l’UE, par la fondée de pouvoirs des Land teutons et par quelques
autres.
Quant aux faits (les fameux faits) :
c’est que sur le terrain il y a comme qui dirait un doute, qui semble ne guère préoccuper
nos va-t’en-guerre habituels. Des observateurs auraient témoigné (remarquez le
prudent conditionnel qui est de mise quand une enquête est en cours) que des
avions syriens tentant de reprendre la province d’Idlib aux soldats d’Al Nosra
(les « rebelles » selon le vocable occidental) avaient bombardé un bâtiment
occupé par ces fondamentalistes ou avaient été entreposées des armes sans doute
chimiques. Dont on ne connait pas encore exactement la composition. Ce qui
aurait donné lieu au massacre réattribué habilement aux syriens et donc au multirécidiviste
Assad.
Vrai ? Faux ? Fake news de
Sputnik ? Allez savoir, je ne suis pas Bernard Guetta, moi, je ne suis pas
enquêteur. Mais celle-ci ne faisant que commencer, l’essentiel n’est pas là
mais bel et bien de prendre sur le plan médiatique de vitesse les ennemis d’aujourd’hui
et d’avant-hier trois jours après le choc de Saint Petersbourg. Afin de
reprendre le jeu des sept cartes des faucons comme avant, sur fond de concert
des Nations.
Cette logique désespérante et désespérée
de l’Oncle Sam tend à une ultime tentative (qui sera peut être couronnée de succès)
de reprendre la main. Les actionnaires de Donald ont tapé du poing sur la
table. Vladimir vient de comprendre en quelques secondes que son équivalent étoilé
est un fantoche, un Pinocchio d’opérette à qui ont vient de supprimer son
compte Twitter. Daesch (aux anges comme Exxon et la City) vient de déclarer
hilare sur ses réseaux sociaux que les Etats Unis d’Amérique sont dirigés je
cite par « un idiot ». J’aurais envie d’ajouter : un idiot utile
pour des intérêts convergents bien compris.
L’ennui (parce que nous ne sommes
pas dans une série addictive mais bel et bien dans une réalité dont la logique
est proprement effrayante) est que cette reprise en mains sur fond de
propagande à la Walt Disney tend à embraser à nouveau un terrain bourré d’explosifs.
Avec l’Irak puis la Libye, on a sur les ruines du chaos crée d’immenses
terrains de jeu de recrutement et d’entrainement pour l’EI. La chute du régime
de Kadhafi a ouvert le verrou de vagues migratoires africaines qu’on estime
pour les quelques années à venir a plusieurs dizaines de millions en direction
de la dinde de cette farce qui se nomme Europe. Laquelle en plus se retrouve exposée
plus que jamais, du fait de son ralliement aveugle à la politique du chaos des
faucons, à un accroissement probable des attentats sur son propre sol.
Au-delà du peuple syrien dont on se
fout depuis le début et qu’on sacrifie encore davantage, c’est toute la région
et au-delà le monde qui, d’un doigt sur le bouton nucléaire, peut dans cette
logique s’embraser. L’équilibre extrêmement instable des jeux diplomatiques
entre grandes puissances sur les dents repart vers le précipice et met en
danger les populations européennes bien davantage que les amis américains.
Les filiales locales de la nébuleuse
Daesch détenant des armes chimiques et bactériologiques, ayant les moyens de
les transporter et/ou de les fabriquer et de les utiliser ou bon leur semble pourvu
qu’on leur en donne le prétexte, on peut sur ces bases sans verser pour autant
dans le catastrophisme imaginer que la logique des choses, cette déraison
destructrice fomentée par une hyperpuissance aux abois, tend au pire. Tout en espérant
que de tel ou tel théâtre quelque évènement survienne pour faire rebasculer le
pendule dans l’autre sens .
Il va falloir beaucoup de sang froid
pour parvenir à interrompre ce processus mortifère dont l’issue me parait à ce
jour incertaine. Beaucoup de sang froid, de clairvoyance, et de foi, dans le
sens le plus noble de ce terme.
Car un simple bruissement de l’aile
du papillon …
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