lundi 13 février 2017

De l'Histoire réécrite par les vainqueurs et de nos médias


Certains d’entre vous se souviennent sans doute de ce magnifique film réalisé et interprété par Julie Delpy, sortie en 2010 et qui s’appelle La Comtesse. Il raconte l’histoire d’une richissime comtesse, Elizabeth Bathory, dans la Hongrie du XVIIème siècle qui, après avoir financé les guerres du royaume contre les envahisseurs turcs, fut accusée par ses débiteurs d’avoir assassiné des années durant de jeunes vierges et d’avoir utilisé leur sang pour conserver éternellement sa jeunesse.

Ce récit, véridique, s’ouvre sur cette apostrophe aux spectateurs que nous sommes : l’Histoire est toujours écrite par les vainqueurs. Par cette simple introduction, la réalisatrice et interprète nous met immédiatement sur la voie : ce que je vais dorénavant vous conter est en toute vraisemblance un travestissement des faits historiques fait au profit de ceux qui y avaient intérêt.

Magnifique parabole sur notre rapport au réel tel qu’il nous est relaté par ceux qui nous gouvernent. Et qui devrait, compte-tenu des nombreux mensonges effectués au cours de l’Histoire par ceux qui ont la main-mise sur son élaboration officielle, nous avoir définitivement servis pour être éclairés. Car jamais le savoir et l’information n’ont été aussi diffusés qu’actuellement.

Et pourtant ! Paradoxalement, c’est au sein de ce monde dit ouvert, où tout est consultable par le plus grand nombre qu’on assiste à la diffusion des pires campagnes de désinformation jamais effectuées à ma connaissance. Effet de l’accélération du temps et de l’immédiateté où tout-un-chacun possède au coin du pouce l’accès à un soit-disant savoir, nous sommes entrés de plein pied dans une ère où les plus roués des stratèges du mensonge érigé en doxa parviennent à ce prodige de faire de chacun de ses lecteurs des agents actifs de leurs thèses les plus fumistes.

Combien de fois, parce que sur un sujet sur lequel j’avais passé des semaines de recherche en confrontant des points de vue antagonistes et en accumulant des documentations contradictoires je me suis vu opposer, à partir d’une conviction énoncée allant dans le sens inverse de ce qui était collectivement considéré comme une vérité, un article du Monde, une accusation de « défendre le camp du mal » ou une proximité avec des thèses complotistes d’extrême droite ? Comme s’il n’y avait de choix qu’entre gober la soupe commune ou pencher du côté obscur avec Alain Soral ?

Avoir été formé à l’école de la philosophie par Socrate et forgé par de nombreuses lectures historiques m’a appris ceci : douter est une nécessité pour qui veut être libre, et rechercher inlassablement en interrogeant toujours ses sources un impératif. En d’autres termes, ne jamais rien prendre pour acquis, mettre en doute le réel et questionner en recoupant différentes écoles est indispensable quand on veut se forger à défaut d’une conviction un savoir juste.

L’ensemble des médias dominants, presse, télévision, radio, appartenant tous à une même oligarchie financière prenant commande à Wall Street et Dubai, il fut vite évident à mes yeux que quelque soit l’affichage politique avancé (gauche, droite, gauche radicale, centre droit etc…) il fallait impérativement quitter ce cadre-là pour apprendre, tout en observant de très près sa doxa afin de repérer les coutures d’un media-mensonge généralisé. Car (comme dans La Comtesse) l’actualité telle qu’ils nous la présentent tous est écrite à l’aulne de leurs intérêts et de leurs intérêts seuls. Au moyen de plusieurs marionnettes faisant semblant sur un théâtre d’ombres de se chicaner sur les nuances d’une vision commune aux pouvoirs pernicieusement totalitaires.

Cela se comprend aisément sur des sujets contemporains majeurs, où l’aquarium est un invariant indiscuté. Il fallait absolument défendre le Koweit en 1991, cette belle démocratie, contre l’odieux envahisseur irakien. Absolument ratifier le traité de Maastricht qui allait nous apporter la prospérité. Défendre la diminution de nos déficits contre toute autre priorité nationale. Nous ouvrir corps et âme à la mondialisation en acceptant comme des impératifs toutes les dérégulations inimaginables. Ratifier la constitution européenne en 2005. Anéantir la Libye et tenir Kadhafi pour un dictateur sanguinaire, aider de soit-disant rebelles à renverser Assad en Syrie. Défendre de magnifiques démocraties nées comme des champignons d’elles-mêmes en Tunisie, en Egypte, en Ukraine etc…
La liste pourrait être encore plus longue. Et sur chacun des sujets, une étude approfondie m’a conduit à remettre de fond en comble tout ce que j’avais jusque là plus ou moins gobé. Sans forcément arriver à la certitude de la position inverse, mais absolument certain que j’avais été passé à la moulinette d’un lavage de cerveau médiatique au profit d’intérêts financiers et industriels qui se gardaient bien d’avoir mis les cartes sur table, et pour cause.

L’Histoire est toujours écrite par les vainqueurs, et la première victime d’une guerre, qu’elle soit militaire ou économique, est toujours la vérité, donc l’information. Gardons-nous bien, nous qui ne partageons aucunement les intérêts de ceux qui nous gouvernent et nous (dés)informent, de devenir à nos esprits défendant les relayeurs passifs de leurs argumentaires. Interrogeons le réel, réapprenons à réfléchir par nous-mêmes, cherchons à nous informer par nos propres moyens.  Ne devenons pas les complices de mensonges que l’histoire finira bien par rétablir. 

Ou alors assumons, et délectons-nous quand à la fin la comtesse Bathory est emmurée vivante sur la foi d’une accusation à charge sans possibilité de se défendre. Et emmurons avec elle notre intelligence.

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